“Venez découvrir la seule île de Charente Maritime accessible par bateau ou par bateau…“
J’aime bien ce slogan publicitaire concernant l’île d’Aix qui, à mon avis, tape juste. Les autres îles désormais arrimées au continent par un pont (Ré, Oléron, Noirmoutier) ont perdu plus ou moins de leur charme insulaire.
Il n’y a pas que cela, la taille de l’île et l’absence de bagnoles font de l’île d’Aix un site naturel remarquable où il fait bon vivre. Certes, l’affluence touristique n’est pas négligeable à certaines périodes mais cela reste malgré tout bon enfant.
Pour apprécier la beauté de l’île et justifier le titre de l’article, regardez ce très beau “teaser” de l’office du tourisme de Rochefort-Océan.
L’île d’Aix a eu une histoire mouvementée, elle a été occupée, envahie, disputée. Le summum est atteint aux 18ème et 19ème siècles lors des conflits successifs entre Français et Anglais. La fortification de l’île a commencé au début du 18ème lorsqu’il est devenu indispensable de protéger l’arsenal de Rochefort situé à quelques milles dans l’estuaire de la Charente.
Pour voir l’évolution de l’aménagement de l’île, on peut commencer par voir la situation actuelle dans le diaporama ci-dessous, avec des cartes et photos aériennes de l’IGN et la carte d’Open Street Map.
On peut poursuivre avec les cartes anciennes issues des collections de Gallica.
Tout d’abord, les cartes de l’île seule, classées par ordre chronologique. Il s’agit pour beaucoup d’entre elles de projets de fortification.
Les deux premières datent de 1672, on remarque qu’il n’existe pas grand-chose sur l’île d’Aix. Puis se succèdent d’autres vues jusqu’à l’époque napoléonienne.
Ci-dessous, j’ai l’impression qu’il s’agit d’un relevé topographique de l’existant : le fort projeté ne semble pas avoir été construit.
Encore un projet de fort en 1753 : le projet est dessiné en traits jaunes.
Je suis intrigué par la carte ci-dessous qui aurait été présentée au Roy le 1er octobre 1757. On y voit des fortifications qui ont bien évoluées depuis les cartes précédentes, il y a de grandes explications sur le “gouvernement” de cette région, l’Aunis et le Bas-Poitou, etc.
Or, les Anglais ont attaqué et ravagé l’île d’Aix entre le 23 septembre et le 1er octobre 1757, pile poil au moment où le chevalier de Beaurain faisait son show à Louis XV. Peut-être s’agissait-il de faire le point sur la situation ?
En tout cas, 5 ans plus tard, la carte de 1762 indique que le fort a été “pris et ruiné” par le Anglais le .. 7bre 1757 (septembre 1757).
Sur cette “relevation au compas” de 1764, il me semble que sur la gauche de l’image on distingue des murailles détruites.
À nouveau des projets de fortification, mais cette fois-ci, ce sont ceux du marquis de Montalembert, Marc-René de son petit nom, qui voulut faire évoluer la technique des fortifications développée par Vauban (un siècle plus tôt) pour l’adapter à l’augmentation de la puissance de feu de l’artillerie. Critiqué par l’administration de l’époque, il fait cependant construire un fort sur l’île à ses frais, défense qui démontre son efficacité et rend déjà caduc la construction prévue du Fort Boyard.
Au début du 19ème siècle, de nouveaux projets, sans doute pour améliorer encore le fort. Le projet ci-dessous est pour le moins pharaonique !
On va prendre un peu de hauteur pour admirer l’île et ses voisines.
Le plan ci-dessous fait le relevé des mouillages possibles entre Aix et Oléron. Il faut savoir que les bateaux de guerre devaient désarmer (descendre les canons, les munitions, les vivres) avant de rejoindre l’arsenal de Rochefort, en raison du faible tirant d’eau de la Charente, ce qui nécessitait de disposer de beaucoup de mouillages et de pouvoir défendre ces bateaux désarmés.
Voici un très joli plan faisant la synthèse des portées des canons pour définir les meilleurs emplacements des batteries. Le fort Boyard est “projeté”.
Sur ce relevé bathymétrique, le Fort Boyard semble construit mais en réalité il n’y a tout au mieux que le soubassement qui sort de l’eau. La construction du fort ne sera achevée qu’entre 1841 et 1859.
Totalement inutile, il a servi de prison pour les Communards. Et de plate-forme pour un jeu télévisé.
Vous l’avez compris, les fortifications de l’île d’Aix et de ses voisines ne servaient qu’à protéger l’accès à l’arsenal de Rochefort, dit aussi Rochefort-sur-Mer mais bien éloignée de cette dernière. Aussi, le fleuve Charente et son estuaire ont été très souvent cartographiés.
Remarquez que les premières cartes ont le nord en bas et à droite, puis à partir de la fin du 17ème, le nord se retrouve systématiquement en haut.
Drôle d’idée de mettre un arsenal aussi loin de la mer. L’avantage était de rendre difficile une attaque par la mer (sans blague !), l’inconvénient était un accès très difficile pour les bateaux un peu importants (il fallait trois marées pour accéder à l’arsenal depuis l’embouchure). Tout cela pour satisfaire les potentats locaux les plus influents. C’est pas aujourd’hui qu’on verrait ces tractations pour le tracé d’une autoroute, d’une ligne TGV ou d’un aéroport !
Maintenant que la région, son histoire et sa géographie vous sont familières, visitez l’île d’Aix !
1 commentaire
C'est vague ... - DESSIN OU PEINTURE · 11 juin 2019 à 8 h 01 min
[…] Le sujet est fascinant, mais l’on s’aperçoit rapidement de la difficulté à dessiner l’eau en mouvement. J’avais déjà fait des crayonnés lors d’un séjour à l’ïle d’Aix. […]