C’est sous ce titre que la Maison de Balzac nous invite à une exposition affichant les liens entre Honoré de Balzac, l’écrivain et Jean-Jacques Grandville, caricaturiste et illustrateur de la première moitié du 19e siècle.
Balzac et Grandville se sont croisés durant une quinzaine d’années. Leur rencontre a lieu en 1829 dans les salles de rédaction de La Silhouette, le premier des journaux illustrés qui inaugure le lien entre écriture, image et média. Après juillet 1830. une liberté d’expression presque totale permet au dessin politique de s’épanouir pendant cinq ans dans deux périodiques, La Caricature et Le Charivari.
Grandville contribue activement à inventer des métaphores plastiques très évocatrices hostiles au pouvoir et nombre de celles-ci gardent aujourd’hui une singulière actualité. Autre acteur essentiel de cette aventure éditoriale, Balzac est un des premiers à pressentir le caractère subversif des caricatures. Ce n’est ailleurs pas un hasard si les lois de censure de 1835 ont principalement visé les caricatures politiques, amenant Grandville à se reconvertir dans l’illustration.
La première partie de l’exposition présente la collaboration des deux hommes. D’abord à travers le travail de Grandville pour La Silhouette puis avec quelques caricatures politiques publiées dans La Caricature. Les thèmes de ces gravures ont un écho étonnamment actuel. L’illustrateur aborde le poids de la fiscalité, la lutte contre le gouvernement ou la censure. En même temps, Balzac est l’un des seuls écrivains de son temps à s’intéresser aux dessinateurs et à tenter de les promouvoir.
La deuxième partie s’attache à “Balzac commentateur de Grandville”.
Les relations entre Balzac et Grandville sont certainement excellentes, car Balzac écrit trois articles où il vante les œuvres du jeune artiste. Dans le premier, il commente avec enthousiasme la série de gravures intitulée Voyage pour I’éternité, composée de neuf lithographies très inventives dans lesquelles Grandville, écrit-il, vient de donner de la gaieté à la Mort.
Le deuxième article évoque la gravure Moeurs aquatiques. Un rapt, qui montre un rat ceinturant une grenouille au bord d’un étang. Balzac joue sur l’ambiguïté de la scène et imagine plaisamment différents personnages – un député, un pair de France, un publiciste, un amateur… – proposer des analyses, évidemment contradictoires, sur le sens profond de celle- ci.
Enfin, Balzac s’arrête sur Les Bacchanales de 1831, une gravure antigouvernementale qu’il interprète à la fois comme une leçon pour les « pantins politiques » et comme une vision prophétique. De son côté, Grandville dessinera au fil des ans plusieurs caricatures de l’écrivain beaucoup moins cruelles que ses charges politiques, et qui attestent la persistance de relations amicales.
La troisième partie nous montre les illustrations que réalise Grandville pour les ouvrages de Balzac.
Les lois sur la presse de 1835 rétablissent la censure, mettant fin ainsi à la caricature politique. Aussi Grandville est-il contraint de se reconvertir dans l’illustration et, à partir de 1810, il participe notamment à deux grandes entreprises éditoriales réunissant les textes d’écrivains connus, Les Français peints par eux mêmes, puis les Scènes de la vie privée et publique des animaux.
Dans le premier, on trouve ses rentiers bien connus et une gravure mystérieuse – pour moi – sur le bureau des cannes et le bureau des parapluies.
Illustré par le seul Grandville, les Scènes de Ia vie privée et publique des animaux, sous le couvert d’une critique des « nations animales », jettent un éclairage satirique sur la vie parisienne et l’actualité. Ayant fourni cinq textes, Balzac en est l’un des principaux auteurs.
Que ce travail soit confié à Grandville n’a rien d’étonnant, puisque sa carrière avait été lancée par la série des Métamorphoses du jour. Cet ensemble de soixante et onze gravures où sont représentés des humains à figure animale dans leurs activités quotidiennes forme une satire humoristique et poétique des mœurs et des institutions. La mise en scène de ce parallélisme entre le système de la société et celui de la nature, l’intérét porté par Grandville aux classifications sociales le rapprochent aussi de Balzac.
Et pour finir, un Petit chat noir en diable qui est à classer je ne sais où …
Les textes des citations de cet article sont majoritairement issus des panneaux de l’exposition et un tout petit peu du site web de la Maison de Balzac. L’assemblage est de mon fait.
L’exposition se termine le 13 janvier 2020.
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