Ce n’est pas une billevesée de mon correcteur orthographique, j’ai bien écrit margoulin Campana et non pas marquis Campana dans le titre de cet article, à propos de l’exposition Un rêve d’Italie du musée du Louvre. Je ne fais que rétablir l’ordre chronologique, puisque Giampietro Campana était, dans la Rome du 19ème siècle, un grand bourgeois margoulin, avant d’être aristocratisé en marquis di Cavelli.
Il n’empêche qu’il avait accumulé une impressionnante collection d’objets d’art dont le Louvre, par les hasards de l’histoire et la volonté d’un empereur de pacotille, a hérité d’une grande partie.
J’ai été un peu choqué en lisant la prose du Louvre consacrée à cette exposition : Elle présente la figure romanesque de Giampietro Campana, sa passion de collectionneur et la manière dont il a réuni cet ensemble extraordinaire. Certes, le marquis avait une passion – boulimique – pour les œuvres d’art italiennes de toutes les époques mais parler de figure romanesque à propos d’un mercanti qui a détourné les fonds du mont-de-piété dont il était le directeur (après son père et son grand-père) pour assouvir sa frénésie anticomaniaque me paraît tout à fait déplacé. D’où le ton un peu ironique que je m’autorise à employer.
Le musée du Louvre présente donc une sélection d’œuvres de cette collection, venant pour la plupart de son propre fonds, mais également du musée de l’Ermitage à Saint-Petersbourg et du musée du Petit Palais à Avignon.
Il faut dire que le marquis a été pris la main dans le sac et qu’il a été lourdement condamné pour tous les détournements de fonds publics qu’il avait commis pour soutenir ses finances personnelles durement éprouvées par tant d’acquisitions. Suite à cette condamnation, la collection a été saisie et dispersée par les États Pontificaux, maîtres de Rome à cette période. L’Angleterre et la Russie ont récupéré les beaux morceaux qui leur plaisaient le plus, et notre pitoyable Napoléon III, dit le Petit, copain de la belle-famille anglaise de Giampietro, a racheté tout le reste avec les sous des contribuables français. D’où la présence de nombreux objets de cette collection Campana dans les collections permanentes du Louvre.
Je ne vous montre pas toutes les “classes” de la collection exposées (c’est le terme utilisé pour répertorier les objets), mais il y a aussi beaucoup de cratères (vases antiques grecs, romains), des verres ou des bijoux.
Si beaucoup d’œuvres sont indéniablement des chefs-d’œuvre, comme le sarcophage des Époux ou la toile de La bataille de San-Romano de Paolo Uccello, d’autres sont moins intéressantes et je ne peux manquer de m’interroger sur l’authenticité de quelques-unes, tellement le travail de “restauration” présenté dans une section de l’exposition s’apparente à mon humble avis à de la falsification. L’exemple de la Vénus d’Anzio ci-dessous est révélateur de méthodes de collectionneur pour le moins ambiguës.
À la place de l’admiration béate que le Louvre voudrait nous faire ressentir, je m’interroge sur le rôle des collectionneurs dans la constitution du patrimoine culturel. Si tous ne se sont pas retrouvés dans la situation de repris de justice de Campana, je pense que l’argent reste leur motivation principale aussi bien en permettant l’évasion fiscale qu’en favorisant la spéculation financière. En multipliant les expositions de collectionneurs, les musées entretiennent cet état de fait mais c’est sans doute le prix à payer pour pouvoir admirer certains chefs-d’œuvre.
Alors, le côté romanesque de la figure du collectionneur, on peut s’asseoir dessus.
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